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Date :: 23/3/2012 12:00:02 (Mettre à jour)
Le 5 septembre dernier, Jean-François Kahn annonçait sa candidature aux prochaines européennes sous l'étiquette Modem. Il s'en explique dans le prochain numéro de Marianne. En voici, en exclusivité, des extraits.

Marianne : Pourquoi passer du journalisme à la politique ?
Jean-François Kahn : J'ai définitivement tourné la page du journalisme. Mais je veux continuer à défendre les idées que, depuis trente-cinq ans, j'ai essayé de développer dans mes articles, mes livres et, tout simplement, la vie. Je ne passe à rien, je continue autrement.
Nous sommes confrontés à un chambardement comparable à la révolution industrielle du début du XIXe siècle qui, certes, ne rature pas les notions de droite ou de gauche, mais modifie complètement les critères de leur énonciation. Regardez : aux Etats-Unis on nationalise deux grandes banques et ça fait grimper la Bourse. Le néolibéralisme parvient à ses plus spectaculaires résultats sous une dictature communiste. Jamais on n'a autant exacerbé les inégalités et les exclusions que ne l'a fait la gauche britannique de Tony Blair. Alors la gauche et la droite… Il faut tout recomposer. Si on peut y aider…
Vous aviez une influence certaine comme journaliste libre de parole. Ne risquez-vous pas de la perdre ?
La question peut se retourner. Cela fait des années que l'on me dit : vous êtes bien gentil avec vos critiques, mais pourquoi ne passez-vous pas à l'acte ? Pourquoi ne mouillez-vous pas votre chemise ? Présentez-vous ! Faites des propositions, ne restez pas dans votre fauteuil !
Mais pourquoi le MoDem ?
C'est le mouvement dont je suis évidemment le plus proche, sans l'être à 100 %, tout le monde le sait. C'est le lieu d'où l'on peut faire bouger les choses, à la fois dans les têtes et d'un point de vue institutionnel. Faire exploser la machinerie bipolarisante : le rêve ! En privé, vous avez des ministres qui stigmatisent la dérive monarchique du pouvoir ; en privé, toujours, vous aviez les pontes socialistes qui vous expliquaient qu'ils ne voteraient jamais Ségolène Royal à l'élection présidentielle. Mais tout cela, ils ne l'auraient jamais dit en public.
Quand on en arrive à un tel degré de double discours, c'est que le système est totalement malade. Alors, si le MoDem peut contribuer à le subvertir, c'est très bien. Il ne suffit pas de répéter que la gauche est dans un état lamentable, que la droite n'est plus qu'un club de supporteurs de Sarkozy, et s'en laver les mains. C'est trop confortable.
Vous avez dénoncé le fonctionnement autocratique du sarkozysme, mais celui du MoDem ne semble guère plus démocratique…
Le MoDem, dont je ne suis pas membre comme vous le savez, est le produit de la transformation d'un parti de notables sans militants à un parti de militants, mais qui ne dispose quasiment plus de notables. Ce n'est pas forcément rédhibitoire ! François Bayrou s'est retrouvé seul parce que, un peu comme François Mitterrand après 1968 ou Pierre Mendès France après 1958, victime de la brutalité de cette mutation, il a été lâché, y compris par sa supposée garde rapprochée. Le danger, effectivement, serait de trouver cette solitude confortable. Mais si personne ne veut accompagner cette expérience nouvelle tout en disant que Bayrou est un type très bien et qu'il a raison, il est sûr que le MoDem deviendra monarchique.
Qu'allez-vous faire d'un mandat européen, qui ne sert pas à grand-chose… ?
Etre confronté à des gens venant de 27 pays, ça m'intéresse. Cela peut être très enrichissant. Mais je dois évidemment, sauf à être égoïste, me demander si, moi, je peux apporter quelque chose. Et, en fait, je n'en sais rien. Est-il possible – c'est toute la question – de provoquer au niveau européen un débat sur la nécessaire refondation de nos sociétés dont l'être doit redevenir le centre, et non plus ni l'Etat ni l'argent ? Ce n'est pas seulement un slogan. On voit bien aujourd'hui à l'œuvre une logique néolibérale que personne ne maîtrise, qui affole même les libéraux et qui a complètement décentré l'homme au profit de l'argent.
Retrouvez la version intégrale de l'interview de Jean-François Kahn dans le prochain numéro de Marianne. Vous pouvez également acheter la version numérique sur le site de Relay (PC) ou sur celui du Kiosque.fr (PC, Mac et Linux) dès vendredi 12 septembre à 16h.
Interrogée hier par « Le Figaro », la ministre de l'Intérieur estime que le danger terroriste est toujours présent en France. Sur le site web du même journal, l'islamologue Olivier Roy relativise cette menace.

« Les islamistes recrutent dans nos prisons. » C'est ainsi que Le Figaro titrait l'interview accordée par le ministre de l'Intérieur dans l'édition du 11 septembre. Pour le septième anniversaire des attentats aux Etats-Unis, « MAM » tente de faire oublier la polémique autour du fichier Edvige en commentant sur un ton catastrophiste l'arrestation de 55 islamistes en France depuis le début de l'année. L'ancien ministre de la Défense avance également les cas de « plus d'une dizaine » de djihadistes français partis s'entraîner dans des camps militaires à la frontière du Pakistan et de l'Afghanistan. Lieux privilégiés des recruteurs de candidats à la guerre sainte : les prisons, dont le ministre de l'Intérieur fait l'une de ses priorités, avec lnternet. Par ailleurs, Michèle Alliot-Marie estime que, « malheureusement », il existe toujours un danger pour les ressortissants français dans certains pays musulmans, après les assassinats de Français en Mauritanie et en Algérie des derniers mois.
Une nébuleuse islamiste affaiblie
Un peu trop alarmiste, MAM? S'il ne dément pas complètement les propos du ministre de l'Intérieur, l'islamologue Olivier Roy relativise largement la menace islamiste en France, dans un entretien publié sur le site web du même Figaro. Pour ce directeur de recherche au CNRS, « Al-Qaida n'aurait pas les moyens d'un nouveau 11 septembre ». « [...] le concours de circonstances qui a rendu possible le 11/9 a peu de chances de se trouver à nouveau réuni, après toutes les mesures policières, de renseignements, prises depuis », a-t-il précisé. Alors que Michèle Alliot-Marie considère que la mutation d'Al-Qaida en une « myriade de réseaux autonomes » rend le danger plus imprévisible, Olivier Roy y voit un signe d'affaiblissement de la nébuleuse islamiste.
Le chercheur attribue par ailleurs l'absence d'attentats en France depuis 1995 au travail des services de renseignement français. « Il y en a qui passeront entre les mailles du filet, il y aura des attentats. Mais [ils] n'ont pas les capacités logistiques pour monter de gros attentats, parce que dès qu'ils veulent passer à l'échelle supérieure, ils doivent circuler, communiquer, stocker, s'organiser, etc. Et c'est là qu'ils peuvent tomber sous les radars des services de polices et de renseignements. »
Le risque, pour l'islamologue, vient surtout de la radicalisation et du passage spontané à l'action de jeunes « en rupture avec leur famille et avec leur milieu, des marginaux », qui n'ont reçu « aucune formation religieuse », et dont beaucoup sont des convertis à l'islam. Olivier Roy estime que 20% des membres des réseaux islamistes en France ont ce profil.
Soupçonnant les diplomates américains de comploter contre lui, le président vénézuelien a exigé le départ de l'ambassadeur des États-Unis à Caracas… avant de se lancer dans une violente diatribe publique contre les «Yankees de merde», les invitant à aller «se faire foutre cent fois» !

Soupçonnant les «soldats à la retraite» qui, selon lui, peuplent les ambassades de fomenter les mouvements d'opposition à l'origine des violences ces deux dernières semaines dans la Bolivie d'Evo Morales, le président vénézuélien a décidé d'emboîter le pas à son camarade bolivien et a demandé au représentant des États-Unis à Caracas de quitter le pays sous 72 heures. Sous peine d'interrompre les livraisons d'hydrocarbures. Un brin énervé par l'arrestation d'un groupe de militaires qui projetaient, selon lui, de l'éliminer, Hugo Chavez a organisé une manifestation dans les rues de la capitale. L'occasion pour lui de se fendre d'un discours musclé, dans lequel il a copieusement insulté les Américains, qualifiés de «Yankees de merde». Une séquence reprise par toutes les télévisions du monde (voir ci-dessous). De quoi faire verser une larme aux nostalgiques du bon vieux temps de l'opération Condor !
Traduction du dernier passage :
«Allez vous faire foutre sales Yankees de merde, nous sommes un peuple digne. Nous sommes un peuple digne, sales Yankees de merde. Allez vous faire foutre cent fois. Nous sommes les enfants de Bolivar, nous sommes les enfants de Tupac Amaru.»
Une autre séquence du discours, avec une traduction plus... polie !
Le pape, qui arrive en France aujourd'hui, est nettement moins populaire que son prédécesseur, Jean-Paul II. Et l'Eglise catholique est aujourd'hui considérée comme très peu influente dans notre pays.

C'est en véritable terre de mission que débarque Benoît XVI aujourd'hui. La France ne peut plus être sérieusement qualifiée de « fille aînée de l'Eglise ». Ce pays a beau être constellé de clochers, le catholicisme est l'ombre de ce qu'il était autrefois. Les trois quarts des Français jugent aujourd'hui que le catholicisme n'est que « peu » ou « pas très influent dans la société française » (1). Et ils sont loin de s'en plaindre ! Seulement un quart des personnes interrogées souhaiterait que cette religion soit « plus présente », un cinquième la voudrait « moins présente » tandis que 52% se disent satisfait de la situation actuelle.
Et ce n'est pas la visite en France du pape qui va améliorer l'image de l'Eglise catholique. Benoît XVI est infiniment moins populaire que Jean-Paul II hier ou que le Dalaï-lama aujourd'hui. Seulement 28% des Français jugent qu'il « défend plutôt bien les valeurs du catholicisme ». Un pourcentage qui ne s'élève qu'à 51% chez les catholiques pratiquants. La majorité des sondés (54%) estiment prudemment qu'il ne les défend « ni bien, ni mal ». En France, le chef du Vatican suscite avant tout une superbe indifférence.
(1) Sondage Ifop pour La Vie, 964 personnes interrogées du 28 au 29 août.
Pour Jean-Paul Delevoye, médiateur de la République, les données de tous les fichiers de la République doivent être irréprochables, et leur utilisation soigneusement encadrée.

Marianne2 : Lancé par des associations et des organisations syndicales, le débat sur le fichier Edvige créé par décret en juillet dernier vient d'obliger Nicolas Sarkozy à demander à son gouvernement de revoir sa copie. Vous êtes le médiateur de la République, pourquoi n'intervenez vous pas ?
Jean-Paul Delevoye : J'ai surveillé avec attention la montée de la contestation. Toutefois jusqu'ici j'estimais ne pas avoir tous les éléments en main. Aujourd'hui, je considère que la polémique sur la création d'Edvige nous offre une opportunité formidable de débattre enfin de la qualité et de l'utilisation des informations contenues dans tous les fichiers de la République. Notamment lorsque ces données ont des conséquences administratives.
Vous étiez pourtant monté au créneau lors de la fusion dans le répertoire Ariane du fichier des infractions constatées par les policiers, le STIC, qui recense 5 millions de personnes et celui des gendarmes, le Judex ?
Dès novembre 2005, alors que nous nous penchions sur cette fusion, j'avais émis avec mes services plusieurs recommandations. D'une part, nous souhaitions qu'un comité de suivi de la qualité de ces informations se réunisse régulièrement (ce répertoire comporterait encore 25% d'erreurs - essentiellement des personnes dont le nom figure toujours au fichier alors qu'il aurait du être radié au vu de l'avancée de l'enquête judiciaire les concernant, ndlr.) . C'est ce que préconisaient les conclusions du rapport Bauer : un comité de contrôle réunissant notamment la Halde (Haute Autorité de lutte contre les discriminations), la CNIL (commission nationale Informatique et libertés) et le médiateur de la République. Or il n'a jamais été réuni. Je viens donc de relancer le ministre de l'Intérieur Michèle Alliot-Marie pour que cette réunion soit convoquée au plus tôt. D'autre part, nous réclamions que tout justiciable qui se voit signifier une décision administrative négative- un refus d'emploi public, le droit de travailler dans une société de sécurité- prise par le préfet sur la base d'une information tirée du répertoire Ariane, soit immédiatement informé sur de ses possibilités de recours et de rectification. En France, l'information des fichiers doit non seulement être irréprochable. Mais encore, l'utilisation de ces données doit être soigneusement encadrée.
Tous critères que ne remplit absolument le fichier Edvige tel que décrit dans le décret du 1 juillet 2008…
Il est évident que dans notre réflexion, tous les garde-fous que nous souhaitons poser pour le fichier Ariane doivent s'appliquer à tous les fichiers de la République, Edvige comme le fichiers des interdits bancaires ou celui des impayés.
Mercredi 10 septembre, le JT de Jean-Pierre Pernaut était pris du démon du jeu : près de deux minutes de publi-reportage sur la nouvelle formule du Loto, soit l’équivalent d’un cadeau publicitaire de plus de 100.000 euros. Merci TF1 !
On peut critiquer TF1 sur beaucoup de sujets, mais pas sur sa gestion de la publicité. Ainsi, quand la première chaîne française décide de promouvoir la nouvelle formule du Loto, elle n'y va pas avec le dos de la cuillère : un sujet d'ouverture du 13 heures de Jean-Pierre Pernaut, des petites phrases accrocheuses et surtout une avance considérable sur la concurrence, puisque les nouvelles grilles ne seront disponibles que le 6 octobre prochain. Bref, c'est mieux que de l'info : c'est du scoop !
«Un peu de rêve, ça fait pas de mal!»
Mercredi 10 septembre, le journal commence de la façon la plus habituelle avec la météo du jour accompagnée de quelques images d'inondations en Espagne. Puis arrive le sujet phare : la nouvelle formule du Loto.
Extrait de la nouvelle campagne de pub pour le Loto, diffusée en exclu sur TF1 le 10 septembre 2008 à 13h04
Et le présentateur de conclure le reportage d'un magistral : «un peu de rêve, ça fait pas de mal !»
115.000€ de cadeau en équivalent pub !
De fait, pour la Française des Jeux, c'est vraiment le rêve : chrono en main, cette échappée du réel a duré 1 minutes 45 secondes. A 33.000€ les 30 secondes de pub avant le journal de Pernaut (source Offre Media.com), la petite balade promotionnelle dans le PMU aurait coûté au moins 115.000€ si elle avait été facturée pour ce qu'elle est. En ces temps de pouvoir d'achat en berne, la Française des Jeux en avait bien besoin !

Sujet de rêve, casting d'enfer
Comble de la joie, ce reportage a fait un autre heureux : Farid Smahi, membre du bureau politique du Front national. C'est lui, le parieur sur lequel s'ouvre le sujet. «Je suis passé quelques fois dans ce genre de reportages : ça a l'avantage de changer l'image du FN dans le quartier», nous a confié le candidat à la tête de liste Île-de-France pour les élections européennes. Bien entendu, l'équipe de tournage ignorait tout du pedigree de son figurant-vedette. Sujet de rêve, casting d'enfer. Pas de chance, en somme…
Après avoir bouffé du curé pendant des décennies, Siné s'en prendrait-il à Charlie Hebdo ? Même format, même jour de parution, même allure… son journal Siné-Hebdo fait un tabac dans les kiosques. Au détriment de Charlie ?

« On sait pas quoi faire. On nage complètement ! ». Pauvre Siné, on aimerait pas être à sa place. Un seul numéro et déjà la débandade… à ceci près que Siné prononce cette phrase en la concluant d'un rire gras. En effet, le premier numéro de Siné Hebdo a fait un carton. En rupture de stock dans nombre de kiosques parisiens dès sa parution mercredi dernier. « Tout est parti en une heure. On n'avait plus rien ! Et encore aujourd'hui entre 50 et 100 personnes sont venues voir s'il m'en restait. On attend un éventuel retirage » explique un kiosquier.
Contacté par Marianne2.fr, Siné se dit « abasourdi. On a eu un coup de fil des NMPP qui nous disaient que l'hebdo était en rupture de stock dans de très nombreux kiosques parisiens, mais aussi à Sète et Montpellier et encore dans d'autres villes. On va mettre en place un stock supplémentaire de 5.000 exemplaires prévu pour la Fête de l'Huma et un retirage de 10.000. Mais pour l'instant, on fait les comptes pour voir si ça vaut le coup d'aller au-delà, parce qu'il y a sans doute quelques invendus dans les Landes ou en Bretagne ».
Siné-Charlie: la bataille des kiosques
Un succès qui bouleverse quelque peu le tableau de marche envisagé. Initialement prévu à 80.000 exemplaires, le tirage du numéro 2 devrait avoisiner les 140.000. Sur le fond, peu de changements pour ce second numéro: « Il y a des gens qui n'ont pas participé au premier, comme Bruno Gaccio, qui écriront dans celui là, mais sinon, on change rien. »
Dur pour Charlie Hebdo, qui lançait cette semaine son site Internet ainsi qu'un numéro spécial sur la visite du Pape en France ? Difficile de dire si le journal - dont le directeur, Philippe Val, a viré Siné avec fracas il y a quelques semaines - a pâti des bonnes ventes de son nouveau concurrent. Les chiffres de vente de l'hebdo ne sont pas encore disponibles. Toutefois, les kiosquiers interrogés répondent que peu de gens ont pris à la fois Siné et Charlie Hebdo. Quant aux lève-tard, privés de Siné-Hebdo, ils seraient encore moins nombreux à s'être repliés sur Charlie. De là à en tirer des conclusions hâtives…
Lire aussi : Pierre Carles offre un pétard mouillé à Charlie Hebdo
La dernière production «pierrecarlesque», «Charlie Hebdo se fait hara-kiri», est arrivée : une compilation d'images d'archives qui laisse le spectateur sur sa faim.
L'extrait mis en ligne il y a quelques jours donnait l'eau à la bouche. Finalement, au lendemain de la parution de Siné Hebdo, le site du Plan B vient de publier l'intégralité du film de Pierre Carles, Charlie Hebdo se fait hara-kiri. Mais après avoir visionné les 18 minutes que dure la vidéo, il faut bien reconnaître qu'on reste sur sa faim puisqu'il s'agit presque exclusivement d'une compilation des interventions télévisées de Philippe Val. Bref, rien de nouveau.
En fait, il suffit de savoir à peu près lire pour comprendre pourquoi on n'en a pas pour son argent. Comme il est expliqué en "une" du site du Plan B, il s'agit là d'un "montage d'archives inédit". Et c'est en effet le "montage" qui est "inédit" et certainement pas les images. Du coup, on a le sentiment que Pierre Carles tire à blanc sur Philippe Val, qu'il offre au patron de Charlie un hara-kiri au coupe-ongles...
Lire aussi : Siné veut-il bouffer Charlie ?
Guillaume Duval, rédacteur en chef d'Alternatives Economiques, démontre le caractère absurde des aides publiques aux heures supplémentaires en période de récession économique. Si ce dispositif a incontestablement du succès, il coûte très cher et se révèle désastreux lorsque le chômage augmente.

Le 21 août dernier, Christine Lagarde, ministre de l'Economie, se félicitait du succès de la loi TEPA, et tout particulièrement de son volet heures supplémentaires[1]. Une semaine plus tard, l'ANPE confirmait la remontée du chômage au mois de juillet[2]. Quantitativement le succès des heures supplémentaires détaxées est indéniable mais, dans le contexte économique actuel, il traduit une politique digne des Shadoks ou du père Ubu. Face au risque de récession, le gouvernement devrait au contraire revenir d'urgence sur une mesure qui aggrave la situation de l'emploi.
Le nombre des heures supplémentaires déclarées - 182 millions au second trimestre 2008 - s'est accru de 6 % par rapport au premier trimestre 2008 et de près de la moitié par rapport au premier trimestre 2007. Du coup, les exonérations correspondantes ont déjà coûté 1 355 millions à la Sécurité sociale sur les six premiers mois de l'année, auxquelles il faut ajouter les pertes d'impôt sur le revenu pour le budget de l'Etat. Soit un coût total estimé à 4 milliards d'euros en 2008 pour les finances publiques par Christine Lagarde. Quasiment la moitié du déficit de la Sécurité sociale cette année. Une politique qui profite surtout aux plus grandes entreprises : 85 % des entreprises de plus de 2 000 salariés ont eu recours à ce dispositif contre moins du tiers des entreprises de moins de dix salariés[3].
Parallèlement, l'INSEE vient d'annoncer un recul du PIB de 0,3 % au second trimestre 2008 et la perte de plus de 12 000 emplois dans le secteur concurrentiel pour la première fois depuis début 2004. Avec en particulier un recul de 45 000 postes d'intérimaires, signe que la dégradation de l'emploi ne fait probablement que commencer : si l'activité n'a pas reculé davantage au second trimestre 2008 c'est notamment parce que les entreprises ont gonflé leurs stocks à hauteur de 0,3 points de PIB, une tendance qui n'a aucune chance de se poursuivre. De plus la productivité a baissé parallèlement de 0,5 % dans l'économie française, indiquant que les entreprises ont retardé l'ajustement à la baisse de leurs effectifs. Côté emploi, le pire est donc probablement à venir.
Côté chômage, les derniers chiffres de l'ANPE confirment sa remontée. Le nombre des chômeurs de catégorie 1[4] n'a certes encore progressé que de 11 000 personnes depuis avril dernier. Mais le nombre total des inscrits à l'ANPE (en dehors de ceux qui ont un emploi et en cherchent un autre) a bondi de 39 800 personnes en l'espace d'un mois, de juin à juillet. L'impact de cette hausse sur le chiffre officiel du chômage a été limité parce que le nombre des demandeurs d'emploi envoyés en formation (et donc retirés de cette statistique) s'est accru lui aussi de 25 000 personnes en un seul mois...
Cette quasi stabilité ne devrait de toute façon malheureusement pas résister à l'arrivée massive cet automne des nouveaux diplômés sur un marché du travail très déprimé : c'est déjà surtout chez les moins de 25 ans que la remontée du chômage est sensible. De plus le gouvernement veut restreindre à partir de 2009 l'accès au dispositif « carrières longues », permettant aux salariés de plus de 56 ans qui ont commencé à travailler très tôt de partir en retraite avant 60 ans.
Une initiative qui devrait contribuer à aggraver significativement la situation du marché de l'emploi dans la mesure où c'était pour une bonne part le succès inattendu de ce dispositif qui explique la rapide décrue du chômage ces dernières années. A quoi vont s'ajouter les effets de la toute nouvelle loi « portant rénovation de la démocratie sociale et réforme de la durée du travail » votée au début de l'été qui multiplie encore les possibilités de faire faire des heures supplémentaires et d'allonger le temps de travail des salariés en « forfaits jours ».
L'argent pour financer 100.000 emplois
Bref, en période de croissance relativement rapide et de baisse du chômage, comme c'était le cas en 2007 lorsque Nicolas Sarkozy est devenu président de la République, il était déjà étrange d'inciter, avec force argent public, les entreprises à faire faire des heures supplémentaires aux salariés déjà en poste plutôt que d'embaucher des chômeurs ou des jeunes qui sortent de l'école. Alors qu'avec 8,5 % de chômeurs en juillet 2007, la France se situait toujours dans le peloton de tête du chômage au sein de l'Europe des 27, précédée seulement par la Grèce, la Pologne et la Slovaquie… Mais aujourd'hui, il est tout simplement surréaliste de se féliciter de l'accroissement de ces heures supplémentaires. Un petit calcul de coin de table illustre l'absurdité d'une telle démarche dans le contexte actuel : un emploi salarié coûtait en 2007 41 000 euros en moyenne en France.
Au lieu de dépenser 4 milliards d'euros avec comme résultat de dissuader les entreprises qui le pourraient d'embaucher, l'Etat pourrait donc, avec la même somme, financer entièrement 100 000 emplois supplémentaires ou encore, avec une subvention correspondant au tiers de leur coût, 300 000 de plus... Si les pouvoirs publics doivent aider des gens à « travailler plus pour gagner plus », qui pourrait contester que ce soient d'abord les chômeurs, dont le nombre augmente de nouveau, qui doivent en priorité profiter de cette aide ?
Christine Lagarde et Nicolas Sarkozy ne sont, bien entendu, responsables ni de la crise des subprimes, ni de la hausse des prix du pétrole et des produits alimentaires. Et donc a fortiori de la récession qui menace désormais la France et l'Europe. Mais dans un contexte profondément transformé par rapport à celui de l'été 2007, il n'est pas interdit de ranger l'idéologie au placard et de faire preuve d'un peu de pragmatisme... Errare humanum est, perseverare diabolicum, disait-on autrefois...
Cette chronique a été publiée sur Alternatives Economiques .
Par Hervé Nathan. Hier, «Nanard» a baladé les membres de la commission des finances qui s'évertuaient à jouer les juges de tribunaux de commerce. Quant au vrai procès Tapie, celui de ses seize ans de relations d'amour-haine avec l'Etat, on l'attend toujours.

Disons-le tout de suite : Bernard Tapie a b… les députés. Mercredi, son audition par la commission des finances, dans les sous-sols de l'Assemblée nationale, a tourné entièrement à son avantage. Non seulement «Nanard» a répondu du tac au tac à toutes les questions des élus de la nation en démontrant une connaissance sans pareille du dossier (normal, c'est le sien), mais en plus il s'est payé le luxe de balader les députés, voire de se payer leurs fioles, au point de se montrer insolent avec des réparties cinglantes du genre : «J'men fous, c'est pas vous le juge», ou «Il faut être à poil pour sortir un pareil papier», etc. La salle, pleine à craquer, où siégeaient pourtant quelques ténors comme François Bayrou (qui s'est inscrit à la commission des Finances pour l'occasion) ou François Hollande, a tout encaissé, stupéfaite au vrai sens du terme, incapable de trouver les mots face au culot de l'ancien député (Tapie fut élu des Bouches du Rhône en 1992-93). A la fin, devant les presque larmes de Bernard Tapie - dont on ne savait pas si elles étaient sincères ou le fruit de son métier actuel - à l'évocation de son «calvaire», il ne restait plus aux élus qu'à rendre les armes devant tant d'audace, de rouerie et d'émotion mélangées. «Plus de questions ?» a demandé le président, le socialiste Didier Migaud. Non. Plus de question. La messe, quatre heures de vain punching ball, était dite.
Pourquoi les députés ne se sont-ils pas montrés à la hauteur de l'enjeu ? Tout simplement parce qu'ils se sont pris pour les juges des tribunaux de commerce qui, depuis 15 ans, examinent l'affaire Tapie. De fait, pendant des heures, à gauche, à droite, au centre, les élus se sont obstinés - tout en s'en défendant - à jouer ce rôle, saisissant les « pièces » partielles d'un dossier d'une formidable complexité juridique. A ce jeu, «Nanard», on l'a dit, a été le plus fort.
A quand un procès des relations entre Tapie et l'Etat?
Il reste pourtant un autre procès qu'on aimerait voir instruire par la représentation nationale : celui de l'Etat - et de ses ministres - et de ses relations d'amour-haine avec Bernard Tapie. Que les députés exigent l'ouverture de tous les dossiers, de toutes les archives des ministères qui ont eu à connaître de l'affaire Tapie. Que l'on sache, par exemple, ce que le gouvernement de 1992 (Bérégovoy) a demandé au Crédit Lyonnais de faire en faveur de Tapie, alors ministre. A l'inverse, ce que celui d'Edouard Balladur a éventuellement recommandé à Jean Peyrelevade en 1993 et 1994 lorsque Tapie a été mis en faillite par le Lyonnais qui, un an plus tôt, lui proposait une «rente de 600 000 francs par mois»… Et pourquoi, en 2002, Laurent Fabius a-t-il souhaité une transaction ? Pourquoi, en 2004, Nicolas Sarkozy a-t-il voulu une médiation ? Pourquoi, enfin, une transaction en 2008 ? Qu'on éclaircisse pourquoi le calendrier des déboires de Tapie semble coïncider avec les alternances politiques ? (1) Que toutes les notes des conseillers de Matignon, de l'Elysée, de Bercy, que les instructions des ministres, quelles qu'en soient l'époque, sortent enfin et soient examinées par le juge politique du gouvernement, le Parlement, devant l'opinion publique. Voilà qui aurait une autre gueule que la confrontation biaisée à laquelle nous avons assisté mercredi. Pour cela, il faut une commission d'enquête parlementaire, seule dotée des pouvoirs d'entendre et d'enquêter dans de bonnes conditions. La Constitution vient d'être modifiée dans le sens d'un plus grand contrôle du Parlement, nous dit-on. Voici l'occasion pour la majorité UMP de le prouver.
(1) Lire pour cela l'intéressante confrontation, sur le site de Challenges, de Airy Routier et de Vincent Beaufils, sur les deux lectures de l'affaire Tapie.
«Mon nom est devenu une injure publique», déplore Bernard Tapie en retenant un sanglot, mercredi lors de son audition à l'Assemblée nationale. Évoquer ce souvenir semble pour lui particulièrement douloureux, comme le montre cette vidéo (extrait à 4'00). L'ancien ministre explique qu'un journaliste aurait un jour été condamné en Bretagne pour avoir, dans le titre d'un article, qualifié de «Tapie breton» un autre homme. «C'est comme si je m'appelais enfoiré, pourri, ordure...», a plaidé Bernard Tapie. Le message est bien passé : l'ancien homme d'affaires va toucher 285 millions d'euros hors intérêts, dont 45 millions pour préjudice moral.