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Date :: 23/3/2012 12:00:02 (Mettre à jour)
Depuis des années, Nicolas Sarkozy se montre très à l'écoute des Français de l'étranger. Il a même proposé qu'ils aient 12 députés sur les 577 de l'Assemblée. De quoi largement changer la donne au Palais Bourbon...
Nicolas Sarkozy, il le répète assez, veut faire « les réformes que personne n'a eu le courage de faire jusqu'à présent ». Parmi celles-ci, il prépare, avec Alain Marleix, secrétaire d'Etat à l'Intérieur et aux Collectivités territoriales, le remodelage de la carte électorale, projet qui devrait aboutir en janvier 2009. Pour se défendre de tout calcul politicien, il répète que ce n'est même pas son idée à lui : c'est le Conseil constitutionnel qui l'a demandé ! Le découpage des circonscriptions des députés opéré la dernière fois par Charles Pasqua date, en effet, de 1986 : il faut donc le réactualiser… Mais pas n'importe comment. Exemple : le projet concocté par Alain Marleix propose d'attribuer 12 députés aux Français de l'étranger sur les 577 qui siègent à la Chambre. Ça, le Conseil Constitutionnel ne l'avait pas demandé. Mais la majorité, oui. Car les Français de l'étranger votent plutôt à droite. Nicolas Sarkozy ne s'y est pas trompé, qui drague assidûment les expatriés. La donne politique à l'Assemblée pourrait donc en être profondément changée. L'opposition l'a bien compris : Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste, a jugé mercredi dernier que cette mesure n'était « pas acceptable ». Explication.
Graisser la patte des expat'
Déjà, en campagne pour la présidence de la République, le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy n'avait jamais manqué une occasion de saluer ces 1,3 million d'électeurs un peu particuliers. On se souvient des meetings auprès des communautés installées aux Etats-Unis et à Londres.
En septembre 2006, le ministre avait profité d'un voyage à New York pour rencontrer les Français et leur dire tout le mal qu'il pensait des 35 heures. Mais en 2007, les expatriés, qui suivaient de près la campagne présidentielle française, avaient parfois du mal à comprendre son discours. D'un côté, il flattait toujours leur travail, de l'autre, rentré dans l'Hexagone, il ne cessait de se plaindre de la fuite des Français à l'étranger - la faute aux excès de charges et aux impôts… Bilan : nos compatriotes expatriés ont quand même voté pour lui à 54%, soit un peu plus que la moyenne nationale, avec des pics dans certains pays (80% en Israël). Et depuis, le Président pense encore plus à eux que jamais…
Vive les profs... à l'étranger
Dans l'agenda de chaque déplacement, de chaque visite officielle, il leur trouve toujours une place, que ce soit en Tunisie ou en Angola. Et l'une des premières mesures qu'il a prises lors de son arrivée au pouvoir répondait à une revendication insistante des expat' : la gratuité de l'enseignement. Dès la rentrée de 2007, les élèves de terminale de tous les pays ont pu en bénéficier dans les lycées français. L'an prochain, ce sera au tour des élèves de première, puis de seconde l'année suivante, etc. Actuellement, les Français de l'étranger sont représentés par 12 sénateurs, avec l'aide de deux associations : l'UFE (plutôt classée à droite) et l'AEFE (plutôt classée à gauche). Elles surveillent, évidemment, le projet. Et s'interrogent : « Comment, en pratique, pourrait-on mettre en place des élections uninominales à deux tours dans des zones comme l'Inde ou l'Afrique de l'Ouest ? Techniquement, ça paraît difficile… », relève François Nicoullaud, président de l'AEFE. De fait, pour élire le Conseil qui, à son tour, désigne leurs 12 sénateurs, les Français de l'étranger ne sont que 14% à se rendre aux urnes. Quel serait le contour de leurs circonscriptions ? En quoi leurs députés seraient-ils représentatifs ? Comment organiser de telles élections ? Autant de questions sans réponse... Seule certitude : dans l'entourage d'Alain Marleix, on assure que ce remodelage électoral pourrait passer « par décret » pour « éviter que chaque député n'y aille de son amendement ». L'opposition n'aurait, ainsi, même pas son mot à dire.
Avec France Inter, la chronique de Bernard Maris, journaliste et écrivain. En Espagne et en Allemagne, rien ne va plus : croissance en baisse, moral des ménages au plus bas, grèves et scandales en tous genres...

Souvenez-vous : ces deux pays dont on nous rebattait les oreilles, en disant : regardez, comme ils sont beaux, libéraux, efficaces ! L'Espagne et l'Allemagne. Mais aujourd'hui l'Espagne ne va plus si bien. Le pays avait grandement profité de son entrée dans l'Europe, mais voilà que les subventions se tarissent. Et surtout, l'Espagne a construit son économie sur un seul secteur : le bâtiment. Or le secteur immobilier est au point mort. D'énormes stocks de logements s'accumulent.
Le chômage a augmenté de près de 20% l'année dernière, et voilà que la croissance espagnole tombe en dessous de la croissance française. L'inflation est là, autour de 4,7%. Le moral des ménages n'a jamais été aussi bas. Les ventes de voitures s'effondrent.
Pourtant, le budget espagnol est en excédent. Le budget de l'Etat, on ne parle pas de la Sécu ni des budgets importants des régions. Mais quand la croissance chute et les recettes fiscales chutent...
Plus 62% d'augmentation pour les patrons du DAX
Les Allemands ont récemment subi une grève du lait, car les producteurs veulent une hausse de son prix. Mais le problème de l'Allemagne touche plutôt son patronat, qui avait exigé d'énormes sacrifices de la part de ses salariés, à tel point que le pouvoir d'achat allemand s'est effondré. Or les patrons ont reçu cette année des augmentations de salaires exceptionnelles. Plus 62% pour les patrons du DAX en 5 ans, plus 2,8% pour le salarié moyen. Et ces patrons du fameux et admirable « capitalisme rhénan » sont embourbés dans des scandales. On se souvient de Siemens et de ses caisses noires, de Siemens payant un syndicat fantoche, de Wolkswagen et de ses fêtes nocturnes pour les membres du comité d'entreprise, du patron de la Deutsche Post qui planquait ses petites économies au Lichtenstein, et on a maintenant Deutsche Telekom empêtrée dans une affaire d'espionnage des journalistes ! Deutsche Telekom espionnant les auteurs de scoop avec des méthodes dignes des services secrets. Où sont passés les rigoureux protestants, si chers à Max Weber ?
La phrase du jour : « Je vois l'humanité sa misère profonde, et tel qu'au premier jour tu l'avais mis au monde... » C'est Méphisto qui parle à Faust !
Retrouvez « L'autre économie » de Bernard Maris, en direct sur France Inter, du lundi au vendredi à 6h49.
Par JR. La dernière livraison du magazine le plus politiquement correct qui soit nous apprend que la délinquance est dans les gènes et qu'on peut détecter les futurs voyous dès la maternelle. Alors, qui avait raison?

« La composante héréditaire n'est pas absente du comportement antisocial et de la délinquance ». Non, il ne s'agit pas d'une interview de Nicolas Sarkozy ou d'une circulaire de Brice Hortefeux, mais d'un extrait d'un article publié dans la dernière livraison de Courrier International. C'est vrai que les lecteurs avaient des raisons de se méfier dès la couverture, titrée tout en nuance : « Les jeunes, un monde de gangs et de violence ». Rien que ça. Mais où est passé mon Karcher ? L'hebdo nous avait pourtant habitués à une ligne très politiquement correcte. Il suffit de lire le récent hors-série consacré à Obama. Dans cette publication d'une centaine de pages, Courrier, toujours censé nous proposer une variété d'opinions provenant de plusieurs sources, a réussi l'exploit de ne pas trouver un seul article hostile, ou au moins sceptique, à l'égard du candidat démocrate...
Mais revenons à la violence des jeunes. D'après le New Scientist, présenté par Courrier International comme « l'un des meilleurs magazines scientifiques du monde », cette violence est « une affaire d'éducation et de gènes ». Quand on se rappelle du tollé médiatique (justifié) provoqué par les propos de Sarkozy sur les gènes et la pédophilie, on n'ose imaginer les hurlements de ces admirateurs d'Obama s'ils avaient lu ces propos dans le Figaro. Mais si c'est le New Scientist qui le dit, c'est autre chose. La rédaction de notre Courrier national enfonce le clou dès l'introduction de l'article en écrivant, sans prendre la moindre distance avec l'article qu'elle publie : « de récentes recherches en sciences cognitives le montrent, les comportements délinquants sont souvent liés à la maltraitance et parfois à l'hérédité ». Tout est dans le « parfois »...
Pour Courrier, on est délinquant dès la maternelle
La journaliste du New Scientist, une certaine Anna Gosline, a d'ailleurs bien du mal à faire son travail de vulgarisation. Son article est pour le moins confus, ce qui pose problème dans un domaine aussi sensible. Mais sa lecture est instructive. « Si l'on en croit Terrie Moffit (vous noterez la précaution de langage de l'auteur), professeur à l'institut de psychiatrie de Londres, il faut distinguer deux types de délinquant juvénile : le plus courant qui commet des infractions légères sous la mauvaise influence de certains amis (...) ». Oui, ceux là, on les connaît bien, ce sont nos enfants. Mais le second type est beaucoup plus intéressant : « (...) il manifeste des signes de comportement antisocial dès la maternelle ». Sarkozy cherchait un gourou scientifique ? Courrier International le lui a trouvé. Il n'a plus qu'à envoyer l'équipe d'Hortefeux en stage dans l'Institut londonien du docteur Moffitt.
Mais lisons plus avant : en associant les données de la cohorte de Dunedin (un échantillon de jeunes néo-zélandais) à celles d'autres études longitudinales (ça, c'est du sérieux !), Terrie Moffitt a constaté que les garçons et filles devenus par la suite des délinquants « à vie » (merci pour les guillemets) avaient généralement manifesté des difficultés de comportement à un jeune âge - parfois dès 3 ans. On se demande pourquoi d'ignorants gauchistes refusent que les enfants soient fichés dès la maternelle. Ils ne doivent lire ni Courrier, ni le New Scientist. Ou sans doute eux aussi avaient un comportement antisocial quand ils étaient petits. La joyeuse Terrie Moffitt devrait les étudier dans son Institut, elle qui affirme que « la moitié des variations dans le comportement antisocial peut être expliqué par la génétique ». Le mot antisocial est d'ailleurs allègrement amalgamé avec celui de délinquance tout au long de l'article.
Finalement, Sarkozy est un visionnaire
Heureusement, la journaliste, soudain rongée par le remords, nous rassure un peu plus loin : « la biologie n'est pas le destin et n'explique pas tout. Il faut qu'elle se conjugue à un autre facteur comme un environnement social défavorable ou une mauvaise éducation parentale ». On respire. En fait, si l'on comprend bien, les gènes de la délinquance s'activent d'autant plus qu'on est pauvre ou battu par ses parents. Où vont-il chercher tout ça ? Le reste de l'article va osciller entre ces deux positions tout au long d'une explication laborieuse où il est question d'une « enzyme de l'agressivité », de l'amygdale (une région du cerveau), et « d'enfants sans réactions émotionnelles ». On a du mal à suivre et l'on se dit que la vulgarisation scientifique est un dur métier, même pour le meilleur magazine scientifique du monde...
La conclusion de l'article est heureusement limpide. Le comportement antisocial de nombreux enfants (dans un cas ou deux cas sur trois, selon la catégorie) s'explique génétiquement. Le remède en découle naturellement : « en identifiant à un stade précoce les enfants à haut risque, les psychologues peuvent intervenir avec des traitement personnalisés avant tout délit (...) Les interventions sont beaucoup plus efficaces sur les enfants de moins de 8 ans ». Si l'on comprend bien, le fichage génétique des enfants dès le plus jeune âge. Sarkozy avait donc raison, et ce sont des scientifiques, relayés sans complexe par Courrier, qui nous le disent.
Comme disait la chanson : « Tu masques ton visage en lisant ton journal. Antisocial, antisocial, antisocial, antisocial ! »
Invité à un séminaire de réflexion réunissant les employés de Marianne, le philosophe Marcel Gauchet s’est livré à une analyse de la charte du journal, de l’antisarkozysme et de la crise du journalisme en général. Marianne2 vous propose trois extraits ainsi que son intervention intégrale.
« C'est sous la lampe qu'on y voit le moins clair. » Au moment où les 66 salariés de Marianne étaient amenés à faire le point, lors d'un séminaire vendredi 30 et samedi 31 mai, il était opportun de proposer à des personnalités extérieures de donner un point de vue de lecteur critique sur notre hebdomadaire.
La direction du journal a donc décidé d'inviter le philosophe Marcel Gauchet à donner sa vision de Marianne. Une tâche dont il s'est acquitté avec brio. Il a d'abord longuement décrypté « la Charte de Marianne », écrite en 1997, lors de la fondation du journal, avec laquelle il a manifesté son accord, avant de revenir assez longuement sur notre anti-sarkozysme qui risque de devenir systématique avec l'omniprésence présidentielle.
Gauchet : intervention intégrale à l'occasion du séminaire de Marianne le 31 mai 2008
par Jean-François Probst. Pendant que les français se préoccupent uniquement - semble-t-il - du Président Sarkozy et des femmes, une grande partie de l'Europe et du monde s'interrogent plutôt sur le résultat du référendum du 12 juin en Irlande.

Certes, les tergiversations de Madame la Garde des Sceaux, Rachida Dati, ne manquent pas d'être inquiétantes. Bien sur, le monde envie, comme chacun sait, les introspections et les états d'âme de Mesdames Dadou et Carlita Sarkozy. Et tout le monde est agrippé à la dernière considération de Madame Simone Veil, concernant le passé et le futur de la France sarkozienne.
Deux tiers des Français ne regrettent pas d'avoir voté non lors du référendum sur l'Europe organisé par Jacques Chirac en 2005. Dans une semaine, les Irlandais vont devoir réitérer par oui ou par non leur position sur cette construction européenne post-girscardienne, et maintenant post-traité simplifié de Lisbonne, à la mode Merkel-Sarkozy.
Yes or no ? Les deux scénarios
Les sondages n'ayant jamais été fiables, aussi bien pour les élections américaines que pour les référendums européens, contentons-nous d'imaginer les deux hypothèses plausibles après le résultat du vote européen le 12 juin prochain. Si les Irlandais rejetaient l'Europe de Lisbonne si chère à l'UMP, notre vieille Europe et son organisation en reviendraient au traité de Nice, et rien ne serait très simple, notamment au moment où la France assumera la présidence de l'Union Européenne à partir du 1er juillet. Si, à l'inverse, le irish oui l'emportait et faisait basculer l'Europe vers un futur fondé sur le mini traité de Lisbonne, alors, et alors seulement, les européens pourraient envisager l'avenir avec l'esprit du futur et l'espoir d'une construction politique, économique et sociale nouvelle.
Chacun sait en Irlande, que les contribuables de cette république, prospère grâce à l'Europe, demeurent néanmoins très sourcilleux quant à la neutralité de leur politique de défense, et très attachés à leur fiscalité particulière. Autant dire que les dérapages du ministre de la défense Monsieur Morin et les wishfull-thinking de Madame Lagarde sur le plan budgétaire et fiscal, risquent bien d'avoir orienté les électeurs de l'Eire plutôt contre la nouvelle Europe que pour.
L'Irlande, pôle industriel et économique
Il serait pourtant préjudiciable à l'avenir de la construction européenne qu'un vrai débat, et pas seulement en Irlande, n'ait pas précédé la constitution référendaire au pays de James Joyce. Sur toutes les chaînes de radio et de télévision française, en particulier, il serait temps d'instruire nos concitoyens français, afin qu'ils situent Cork, Killarney, Shannon ou autre Bantry bay… Car « in Dublin fair city, where the girls are so pretty… » L'Irlande fut un des derniers havre de paix de vacances de Madame de Gaulle et du Général. C'est, aujourd'hui, l'une des plus belles destinations pour les touristes et l'un des meilleurs pôles de l'industrie et de l'économie en Europe.
Chacun doit le comprendre, une partie du destin européen repose sur le résultat du 12 juin irlandais, le confort du Président Sarkozy et de la présidence française, même si le confort ne doit pas être la priorité, en dépendra largement. Vive l'Europe, en attendant l'Irlande, puisque la France, elle, a décidé en son parlement. C'est moins populaire et surtout moins démocratique.
Avalanche de commentaires : cette semaine, la polémique a fait rage autour des articles sur le mariage annulé de Lille. Les Mariannautes avancent des contre-arguments qu'on ne peut ignorer. Chiche ! Continuons le débat !
329 commentaires sous l'article de Bénédicte Charles, Ramadan l'avait rêvé, les juges l'ont fait, 259 réactions à celui de Catherine Kintzler, Cachez cette virginité que je ne saurais voir ! … clairement, l'objet de toutes les discussions mariannesques cette semaine, c'est ce fameux mariage annulé pour non virginité de l'épouse. Et le débat vole haut, arguments contre arguments. Parmi les détracteurs de Bénédicte, on trouve par exemples des renvois, sous la plume de Davesnes ou de Yobs, à l'article du célèbre blogueur Maître Eolas, qui analyse ce sujet sous l'angle juridique ; A lire : c'est vraiment très intéressant. Pour certains, comme Yobs, il y a également un vrai problème moral autour de ce fait de société : le jugement de Lille « arrange la mariée ». Enfin, d'autres, comme Isidor, sont gênés par le fait que Bénédicte s'en réfère à Tariq Ramadan : « L'auteur ne se soucie guère de qui elle attaque pourvu qu'elle attaque... avec tous les clichés sur les musulmans et les vierges », écrit ce mariannaute, avant d'évoquer le cas d'un mariage annulé par des catholiques, en 1997. Voici, au moins, trois vraies questions qui ouvrent la controverse : la justice n'a-t-elle pas fait que son devoir ? La morale ne nous commande-t-elle pas d'empêcher un mariage qui n'est pas désiré par l'épouse ? L'universalisme ne nous impose-t-il pas d'être tolérants avec toutes les religions ?
Juridique
Prenons la question sous l'angle juridique : Maître Eolas s'en tient au simple fait que c'est le « mensonge » sur la virginité – mensonge reconnu par l'épouse – qui est en jeu dans l'annulation de ce mariage. Mais peut-on fermer les yeux sur le contenu de ce mensonge ? Comme le relève très justement Pierre 60 : « Hommes et femmes sont égaux devant la loi, mais pas devant la nature : essayez de garantir la virginité ou la non virginité d'un homme ! » Diogène renchérit : la femme peut-elle « être considérée comme un mouchoir jetable que l'homme refuse d'utiliser parce qu'il a déjà servi à un autre homme ? » De fait, c'est déjà souscrire à cette femme-kleenex que de considérer que sa virginité peut être une « qualité essentielle » !
Ces commentaires éclairent bien l'hypocrisie de l'argument juridique : au fond, ce « mensonge » sur une pseudo « qualité essentielle » de l'épouse qui serait sa virginité n'a de sens que du point de vue des valeurs rétrogrades prônées par de nombreuses religions, qui exigent toujours des femmes plus de signes de leur soumission. Heureusement, tous les croyants n'y souscrivent pas : mais ce n'est en aucun cas à la République de verser dans ces travers.
Ethique
Deuxième point : la justice n'a-t-elle pas sauvé cette jeune fille d'un terrible destin grâce à ce jugement ? A quoi l'on peut répondre aussi sec : si le mariage est forcé, c'est sur cette considération qu'il peut être annulé ! Pas sur un alibi dégradant, qui fait passer l'épouse pour une marchandise comme les autres. A cet égard, Attila ironise bien : « Je suis désolé mais quand tu payes pour du neuf, il est normal que tu reçoives du neuf, la dernière fois chez Renault ils m'ont refilé une voiture "neuve" avec 14 km »… Eh oui, c'est exactement la même chose et c'est bien ça qui est insupportable !
Laïc
Enfin, dernière question : quid de la tolérance ? Les catholiques, les musulmans, les croyants de toute obédience, secte, religion… n'ont-ils pas le droit de voir leurs valeurs respectées par la loi républicaine ? Le commentaire numéro 315, signé Biloute, sous l'article de Bénédicte, remet bien les points sur les i : bien sûr que les croyances sont respectables, mais ce n'est pas à la loi républicaine de s'y plier pour autant ! Or ce jugement, sanctionnant la virginité comme « une qualité essentielle » « est, sur le territoire de la République, une grave atteinte au principe de laïcité ».
Mariannesque
Alors, il est vrai : cette affaire est un cas isolé, une affaire privée, sur laquelle médias, lecteurs, électeurs et politiques ont beaucoup disserté cette semaine… Mais c'est tout le problème des principes – en l'occurrence des principes républicains : un seul cas y déroge, et ils sont menacés. La vigilance à leur égard est donc un devoir. Les Mariannautes y veillent.
Par Brusyl, mariannaute, pour qui le mariage est de plus en plus considéré comme un acte purement légal, tant et si bien qu’il doit désormais être seulement réglé par le notaire. A ce titre, l’annulation n’est pour lui qu’une « simple » application du Code civil. Rien de plus.

Une défaite de la république rien que cela ?
Le mariage devient de plus en plus, comme l'écrit Zingler, un contrat privé entre deux personnes et non un acte civil : car c'est bien le gouvernement actuel qui veut que le divorce par consentement mutuel relève dorénavant de la compétence du notaire et non plus de la justice, n'est-ce pas ?
Lorsque le mariage n'est plus le socle d'une société, et devient un simple contrat signé entre deux personnes, c'est effectivement le droit du contrat qui doit s'appliquer. On ne peut réfuter qu'il y a bien eu réticence dolosive de la part de la mariée, un mensonge ou un non-dit. Portait-elle sur une qualité essentielle de la personne ? Pour le marié, oui.
L'article 1116 du Code civil dit : « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. »
Les juges ont entendu les deux parties qui souhaitaient l'une et l'autre l'annulation de ce mariage et non un divorce et se sont rendus aux raisons du mari, estimant sans doute que laisser subsister un mariage basé sur un mensonge que le mari ne pouvait accepter n'était pas souhaitable. L'annulation de ce mariage, que désiraient Monsieur et Madame, n'était recevable sur aucun autre motif.
Ce qui me choque beaucoup plus sont les cris d'orfraie poussés par le monde politique et médiatique : le monde judiciaire applique le droit en son âme et conscience et ne doit pas être soumis aux pressions de l'exécutif et du politique et de la pensée unique du moment. Et une nouvelle loi va sans doute intervenir pour régler cette tempête dans un verre d'eau !
Cette semaine, l'affaire du mariage annulé détrône (momentanément) Sarkozy au hit-parade des articles les plus lus sur Marianne2. Les déboires de TF1 vous intéressent toujours autant. Et l'avenir du PS vous préoccupe…
1) Ramadan l'avait rêvé, les juges l'ont fait, par Bénédicte Charles, 16309 visites, 324 commentaires
2) Sarkozy fait péter l'audiomètre, par Nicolas Domenach, 15800 visites, 89 commentaires
3) Dati sort ses griffes, par Nicolas Domenach, 14723 visites, 110 commentaires
4) Cachez cette virginité que je ne saurais voir ! par Catherine Kintzler, 14048 visites, 259 commentaires
5) TF1 est en guerre ! par Régis Soubrouillard, 13065 visites, 86 commentaires
6) Sarkozy croit au père Noël, par Nicolas Domenach, 12107 visites, 106 commentaires
7) O toi, France qui se lève tôt, ne lis pas le Monde ! par JR, 12005 visites, 37 commentaires
8) 13% de chômeurs aux Etats-Unis ! Qui le sait ? par Philippe Cohen, 11860 visites, 88 commentaires
9) J6M : Jean-Marc Morandini Moi-Même Maître des Médias, par Luc Mandret, 11179 visites, 111 commentaires
10) E. Todd : Les socialistes sont sur le pont de la rivière Kwaï, par Philippe Cohen, 10540 visites, 143 commentaires
57e semaine de Sarkofrance pour Juan. « Si j'avais su, je n'aurais pas voté pour Sarkozy », disent les Français. Mais vous saviez. Pas tout, mais l'essentiel. Alors de quoi vous plaignez-vous?

Avez vous remarqué ? A chaque coup dur gouvernemental, donc très régulièrement, Nicolas Sarkozy ou l'un de ses ministres nous expliquent qu'ils ne font qu'appliquer le programme présidentiel, que les Français ont voté en connaissance de cause, que les promesses sont tenues. Bref, « nous savions, vous saviez ». Donc il n'y a aucune raison de se plaindre.
Pour cette 57ème semaine de Sarkofrance, nous savions effectivement beaucoup de choses.
Saviez-vous... pour le Bling Bling ?
La pause dans l'exubérance de paillettes n'a eu qu'un temps. Nicolas Sarkozy et son épouse font à nouveau la une des magazines. Carla Bruni a confié ses secrets à quelques journalistes, et se fait prendre en photo dans le Fauteuil Présidentiel devant un Nicolas Sarkozy souriant. Elle nous apprend même qu'il a « cinq ou six cerveaux remarquablement irrigués ».
Nous savions évidemment que Nicolas Sarkozy aimait les femmes, ou qu'il avait un besoin à la fois narcissique et politique d'exhiber sa vie privée sous les flashes des photographes.
Saviez-vous... pour la politique d'immigration ?
C'était dans son programme. Nicolas Sarkozy a créé ce ministère d'un autre âge, « l'Identité Nationale », durci le regroupement familial, fixé des quotas d'expulsions de clandestins, défini des quotas d'emploi par pays. Nous savions que cette « politique du chiffre » génèrerait des tensions, des dérapages, des douleurs. Nous savions qu'elle était un gage essentiel à l'électorat frontiste du Président. A l'approche de la présidence française de l'Union européenne, Sarkozy veut exporter son modèle ailleurs en Europe.
Saviez-vous... pour Rachida Dati ?
La nomination de Rachida Dati à la tête d'un ministère régalien en juin 2007 était un signe formidable... pour l'image. Pour le reste, la personne était déjà porte-parole du candidat Sarkozy. On connaissait ses bourdes. On connaissait son parcours. On savait qu'elle était la « médaille beurette » que le Ministre de l'Intérieur avait très tôt accrochée à sa veste quand il visitait les banlieues. Il ne fallait pas attendre Rachida Dati sur le fond.
Un an à peine après sa nomination au poste de Garde des Sceaux, l'état de grâce est bien loin. Nous ne savions pas que son échec pouvait être aussi rapide et patent : elle est l'icône de Dior pour les Guignols de l'Info, la risée des gazettes. Ses volte-faces opportunistes agacent jusque dans son camp. Ses bourdes inquiètent Sarkozy. Elle s'est mise à dos l'institution judiciaire, la moitié de son cabinet l'a quittée, elle dérape à l'Assemblée.
Saviez vous... pour les inégalités ?
L'été dernier, Nicolas Sarkozy a fait adopter un « paquet fiscal » qui prévoit, notamment, l'exonération partielle des droits de succession, et le renforcement du bouclier fiscal (de 60% à 50%). Il applique son programme. La droite au pouvoir était déjà responsable d'une forte augmentation des niches fiscales, entre 2003 et 2008, dont le coût est passé de 50 milliards d'euros en 2003 à 73 milliards en 2008. En mai 2008, le gouvernement fait mine de découvrir que les défiscalisations en tous genres font du mal au budget de l'Etat. Nous savions aussi que le gouvernement réduirait le nombre de fonctionnaires, et plus particulièrement d'enseignants. Les lycéens et leurs professeurs protestent. Mais ils savaient.
Saviez-vous... pour le déficit budgétaire ?
Le candidat Sarkozy avait promis fromage et dessert : on travaillerait plus, on gagnerait plus et il réduirait les prélèvements obligatoires de 68 milliards d'euros en 5 ans. Nous savions qu'il enterrerait les 35 heures sans le dire. L'UMP fait une fixette idéologique sur un dispositif qui ne concerne même pas la majorité des actifs en France.
Finalement, le déficit budgétaire se creuse : on l'a annoncé à 45 milliards d'euros cette semaine. Êtes-vous surpris ? A force de défiscaliser à tout crin, les ressources publiques font défaut.
Saviez-vous... pour le pouvoir d'achat ?
Le plus embêtant est certainement que nous n'avons pas eu davantage de pouvoir d'achat pour autant ! Depuis un an, le Président peine à convaincre de ses mesures en faveur du pouvoir d'achat. Il s'est même résolu à nommer un publicitaire, Thierry Saussez, à ses côtés, pour redresser la barre. La flambée du prix du pétrole et des matières premières n'arrange rien. Que le Grenelle de l'Environnement ait omis de définir des mesures concrètes en faveur des transports collectifs et du fret, et des énergies renouvelables ne choque personne. Nous le savions. L'écologie était un sticker électoral de plus sur le blazer du candidat.
Nous savions que le slogan de campagne ne concernait pas les retraités (travailler plus ?), les chômeurs, les précaires du temps partiel. Nicolas Sarkozy avait fait des 35 heures sa bête noire idéologique. Qu'une majorité d'actifs ne soit pas concernée par les RTT importait peu. Nous savions que le gouvernement viderait les dispositifs Aubry de leur substance sans chercher à les aménager. Nous pouvions même savoir que la France n'est pas ce pays de fainéants où l'on travaille moins qu'ailleurs ! Nos voisins européens ont une durée moyenne hebdomadaire de travail facialement plus élevée, mais davantage de travailleurs à temps partiel que nous.
Oui, vous saviez.
Et pourtant, vous avez voté.
Pourquoi ?
Par Carpe Diem, mariannaute, qui regrette que l'affaire du mariage annulé se soit transformée en querelle de juristes.

Un consensus mou autour d'une régression insupportable : un jugement de répudiation ! Et on ergote sur la virginité, les détails morphologiques, sur la « légitimité » du bout de drap rougi que le marié exhibe à la foule en signe de victoire de l'homme sur la femme, on discute des croyances, des textes humains qui ont codifié ces obscurantismes… et on ne parle pas de la Laïcité.
Au delà du droit des femmes à disposer librement de leurs corps et surtout de leur droit de penser librement c'est la Laïcité qui est mise à bas.
Les crucifix ont été retirés des tribunaux il y a un siècle par la volonté du peuple. Doit on accepter que quelques magistrats sous influence islamo-gauchiste y fassent entrer le Coran ? Cette régression anti-constitutionnelle devrait susciter un immense émoi, partout.
Aux exégètes des textes « divins », aux décortiqueurs de Coran ou de Bible, aux chercheurs de mystères là où il n'y a rien d'autre que de l'humain manipulateur, il serait bon de rappeler que Mahomet a donné l'exemple de l'égalité entre les hommes et les femmes : à sa mort, il a laissé neuf veuves interdites de remariage. C'est pas de l'égalité des sexes, ça ? Ça devrait intéresser le petit peuple innombrable des ignorants de la « chose sacrée », au moins autant que le sexe des anges et des démons.